Piolets d'Or - Traversée « Moonwalk Traverse » du massif du Fitz Roy (3 405 m)

Traversée « Moonwalk Traverse » du massif du Fitz Roy (3 405 m)

©Rolo Garibotti

Moonwalk Traverse (4 000m+, 6c 50°), première traversée complète du sud au nord du massif du Fitz Roy (de l’aiguille de l'S à l’aiguille Guillaumet), du 5 au 10 février, en solo.

Cinq jours durant en février 2014, les Américains Tommy Caldwell et Alex Honnold avaient réalisé une étonnante et très convoitée traversée d'arêtes du nord au sud, sur l'ensemble du massif du Fitz Roy, de l’aiguille Guillaumet à l’aiguille de l'S. En 2015, la Fitz Traverse avait été récompensée par un Piolet d'Or.

Début 2020, coincé à El Chaltén après le début de la pandémie de COVID et constatant beaucoup plus de cas et de restrictions en Europe qu’en Patagonie, le Belge Sean Villanueva O'Driscoll a décidé de rester, « confiné » dans ce terrain de jeu géant. Début février 2021, il est prêt à se lancer dans un rêve : traverser l'intégralité du massif du Fitz Roy en solitaire, du sud au nord, donc en sens inverse des Américains. Le projet, long de plus de cinq kilomètres et d'un dénivelé total de plus de 4 000 m, suit la skyline depuis l’aiguille de l'S à l’aiguille Guillaumet en passant par l’aiguille Saint-Exupéry, l’aiguille Rafael Juárez, l’aiguille Poincenot, l’aiguille Kakito, le Cerro Fitz Roy (Cerro Chaltén), l’aiguille Val Biois, l’aiguille Mermoz, et l’aiguille Guillaumet sud.

Villanueva O'Driscoll n’a emporté qu’un un sac à dos léger, un petit sac de hissage (qui se cassera plus tard, devenant inutilisable), 10 jours de vivres, un sac de couchage, une petite tente et sa flûte irlandaise dont il ne se sépare jamais, soit un poids total initial de près de 30 kg.

Le premier jour, sa corde à simple subit trois chocs, l’abîmant jusqu’à l’âme et elle tiendra de justesse jusqu'à la fin de la traversée. Peu de temps après, il perd des coinceurs à cause de la rupture d’un porte-matériel. Grimpant en libre, la plupart du temps à vue, et s’auto-assurant avec un GRIGRI® dans toutes les longueurs, sauf les plus faciles, il parcourt donc la majeure partie de l’itinéraire trois fois. N’ayant emporté aucun appareil de communication et, en raison du calme environnant à cette époque, il ne rencontre que trois autres cordées. L’Américain Colin Haley, prolifique alpiniste en Patagonie (mention spéciale aux Piolets d’Or en 2017), a estimé qu'il s'agissait sans doute de l'ascension en solitaire la plus impressionnante jamais réalisée dans cette région.

Le jury a estimé qu'il s'agissait d'une ligne élégante et soutenue, qui avait été tentée ou imaginée par plusieurs équipes, bien que personne ne semblât l'avoir envisagée en solitaire – une aventure inaccessible pour la plupart des grimpeurs. Si, à l'exception de quelques longueurs, le terrain n'était pas nouveau, le style est remarquable,  combinant escalade technique, endurance, engagement mental et expérience considérable de la Patagonie. L’approche positive et optimiste de Sean a suscité l'admiration de tous, tant lorsque le pays a été confiné qu’au début de l'itinéraire, lorsqu’il a dû faire face aux dégâts et aux pertes de son matériel..

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