L'alpiniste Walter Bonatti fait ses adieux.
Quarante-cinq ans après avoir mis fin à sa carrière d'alpiniste extrême, le mythique grimpeur italien a annoncé ce week-end qu'il mettait fin à sa vie publique.
À 79 ans, l’Italien reste une référence absolue, un repère dans l’univers de l’alpinisme. En remettant à Courmayeur le premier Piolet d’or Carrière à Walter Bonatti, le milieu montagnard a honoré le massif du Mont-Blanc, lieu de prédilection de l’alpiniste italien. Mais surtout, une carrière exceptionnelle et un homme de conviction. Des images et des mots qui ont résonné dans une salle comble et particulièrement émue.
Walter a juste prononcé quelques mots : " N'oubliez pas que la solitude développe la sensibilité et nos émotions. "
En 1965, quand Walter Bonatti fait ses adieux à l’alpinisme, il est sans doute le plus grand alpiniste de son époque. Pour tirer sa révérence, Bonatti a imaginé un fantastique exploit : l'ouverture en hiver et en solitaire d'une voie directe dans la face nord du Cervin. A 35 ans, il accomplit là son dernier chef d'œuvre, le point d'orgue d'une fantastique série d'ascensions.
Le jeune homme originaire de Bergame fait irruption sur la scène de l'alpinisme en 1949. Il a 19 ans quand il réalise la sixième ascension de l'éperon Walker des Grandes Jorasses avec trois jeunes amis. Deux ans plus tard, il règle le dernier problème du moment, la face est du Grand Capucin, le mur le plus raide du massif du Mont-Blanc.
Walter Bonatti participe en 1954 à l'expédition italienne au K2. Expérience douloureuse durant laquelle il survit à un terrible bivouac à haute altitude avec le porteur Mahdi, suite à un malentendu avec ses compagnons. Au retour, il doit faire face à des attaques injustifiées, et il ne lui sera rendu raison que 50 ans plus tard.
Il se lance alors un extraordinaire défi et réussit en 5 jours de l’été 1955 la première du pilier sud-ouest des Drus en solitaire. Suivent les premières de la face est du grand Pilier d'Angle au mont Blanc (1957 avec Toni Gobbi), du pilier Rouge du Brouillard (1959, avec Andrea Oggioni) ou de la face nord du grand Pilier d'Angle, une terrible course de glace (1962, avec Cosimo Zappelli).
Il prend sa revanche en Himalaya en 1958 au Gasherbrum IV (7980 m), dont il atteint le sommet avec Carlo Mauri.
En 1961, il est l'un des rescapés de la tragédie du pilier du Frêney, au mont Blanc, au cours de laquelle quatre des sept alpinistes trouvent la mort dans la tempête. En janvier 1963 il réussit, par un froid polaire, la première hivernale très convoitée de l'éperon Walker des Grandes Jorasses.
Rares sont ses premières qui relèvent de l'anecdote. La logique de l'itinéraire, l'engagement, l'esthétique et le respect de l'éthique d'un alpinisme naturel en sont les marques.
Après son exploit au Cervin, Walter Bonatti consacre son temps au voyage, à la photo et à l'écriture. Il collabore à de grands magazines italiens, comme Epoca. S'il se tient désormais à l'écart du monde alpin, il en reste la référence. Sa voie au Grand Capucin devient classique, son pilier aux Drus est un modèle d'élégance que tout alpiniste rêve d'escalader. Mais l'importance de Walter Bonatti dépasse de beaucoup l'énumération de ses performances, et tient à son discours, celui de l'homme droit, exigeant, humaniste qu'il est.
45 ans après ses adieux, Walter Bonatti est resté un repère dans l'univers de l'alpinisme.
Pour toutes ses raisons, il se voit remettre par Fabrizia Derriard et Eric Fournier, maires de Courmayeur et de Chamonix, le titre de citoyen d'honneur du Mont-Blanc le 31 juillet 2010.